Antoine et Olga (Denis Ménochet et Marina Foïs, tous deux parfaits) forment un couple de Français installés depuis un certain temps dans un village de montagne en Galice. Ils se sont lancés dans l’agriculture biologique et un projet de restauration de maisons pour favoriser le repeuplement rural. Ils semblent avoir trouvé leur place. Mais quand un projet d’éolienne les oppose à leurs voisins, rien ne va plus. Petit à petit, la méfiance du voisinage se transforme en coups bas, harcèlements, menaces et violences.
Pour son nouveau long métrage, le réalisateur espagnol Rodrigo Sorogoyen, déjà remarqué pour ses films précédents –El Reino (2018) et Madre (2019) notamment – s’attache à creuser des thèmes qui lui sont chers : les vils instincts humains, et les répercussions sur celles et ceux qui en sont les victimes ou les témoins. Il continue à explorer les limites du jeu social en ancrant cette fois son histoire dans une nature enveloppante et sublime, un territoire que chacun pense à tort, pouvoir défricher.
Situé dans la région la plus à l’ouest de l’Espagne, juste au nord du Portugal, As Bestas a des airs de western moderne. La vie est rude dans cette contrée isolée et les clans se forment rapidement. Pour tenir son public en haleine, Rodrigo Sorogoyen confronte les points de vue pour mieux exacerber une xénophobie que rien ne peut désamorcer. Il est question ici de deux mondes qui ne partagent rien – ni la langue maternelle, ni les valeurs, ni les modes de vie – et qui sont incapables de communiquer.
As Bestas est un thriller qui bénéficie d’une parfaite maîtrise du récit. Le rythme, la très belle photographie, la direction d’acteurs confirment le talent de son réalisateur. Ses plans s’attardent d’abord sur le quotidien de ses personnages principaux, sur leurs gestes assurés et sur leur routine peu à peu pervertie. Les plans séquences virtuoses permettent de retranscrire la peur et la paranoïa qui, peu à peu, contaminent l’existence du couple français victime d’un engrenage destructeur. L’hyperréalisme se fait terrifiant.
Avec cette histoire qui relève autant du drame intimiste et social que du thriller, Rodrigo Sorogoyen signe un film intense qui renvoie les hommes à leur animalité. (« As Bestas » signifie « Les bêtes », en galicien)

Sources : lesinrocks.com, avoir-alire.com, La Croix, bande-a-part.fr, 20/07/2022.

Dans le cadre du festival Télérama