L’été, Rimini est une énorme station balnéaire où les transats se confondent avec la mer. L’hiver, il y a de la pluie et des courants d’air, de grands hôtels vides où quelques retraités viennent écouter Richie Bravo, chanteur de charme en fin de règne et Autrichien expatrié adressant ses roucoulades aux yeux énamourés de ses admiratrices, de moins en moins nombreuses. Richie fait ce qu’il sait faire de mieux : vendre de l’amour. Il est expert dans sa manière d’utiliser ses charmes. Ulrich Seidl, le réalisateur, est un portraitiste féroce. Ainsi, il choisit d’affubler son héros de toutes les tares des nombreux anti-héros de la comédie italienne des années 70, campés jadis par Vittorio Gassman, Ugo Tognazzi ou Alfredo Sordi. Comme eux, Bravo est un être minable et sublime, ringard et magnifique…. qui vacille quand il retrouve sa fille venue lui demander de l’aide.
Mais Seidl est aussi un cinéaste autrichien. Très vite, il nous fait redescendre au sens propre dans les sous-sols de l’inconscient de ses compatriotes et filme l’effondrement de son héros avec une netteté confondante, renforcée par le glacis et la sécheresse de l’image numérique. Comme toujours, le décor a son importance, tout comme la composition des plans, revêtant ainsi une signification que certains trouvent parfois trop appuyée, mais qui enfonce souvent le clou de points de vue politiques ou sociaux pertinents.
Pourtant, malgré ces nombreux défauts, Richie Bravo a une flamboyance pathétique. Le cinéaste lui accorde même un regard qui n'est pas exempt de tendresse, à l’instar de tous ses personnages, même les plus abîmés. Cette humanité qui se love sous les oripeaux de la cruauté, est bien présente dans Rimini, même si on peut avoir l’impression que tous les personnages sont englués dans leur égoïsme individuel. En fait, Seidl pratique un comique cruel et à l’os, qu’on peut ne pas apprécier, mais on doit cependant reconnaître qu’il fabrique, film après film, une comédie humaine désespérée sur une génération de boomers européens dont Bravo serait l’incarnation spectaculaire.

Sources: Liberation, Le polyester.com, Télérama.fr, Positif n°741, Abusdecine.com