Jessica Hausner a acquis la notoriété en 2019, à Cannes, lorsqu’elle a présenté en compétition Little Joe, une œuvre de science-fiction qui évoquait l’insidieuse prise du pouvoir sur l’espèce humaine d’une plante génétiquement modifiée grâce à son parfum entêtant.
Avec Club Zero, elle continue dans la même veine esthétique avec une rigueur formelle qui n’est jamais prise en défaut. A l’instar de ses compatriotes Michael Haneke et d’Ulrich Seidl, elle n’hésite pas à créer une atmosphère anxiogène et à rendre le malaise palpable. Cela peut décontenancer mais si on adhère à sa mise en scène, cela devient passionnant.
Dans son nouveau film, l’action se situe dans une institution d’élite privée pour adolescents de la très haute bourgeoisie. Sur proposition des parents d’élèves, une nouvelle enseignante est accueillie à l’école où elle dispense un cours de nutrition avec un concept innovant, bousculant les habitudes alimentaires. La méthode qu’elle prône conseille, par exemple, de respirer avant d’avaler sa tablette de chocolat. Prendre ainsi conscience de son alimentation serait, selon elle, un moyen de participer à la protection de l’environnement. Sans qu’elle éveille les soupçons des professeurs et des parents, certains élèves tombent sous son emprise et intègrent le cercle très fermé du mystérieux Club Zéro. Jessina Hausner livre ainsi une nouvelle variation d’un thème qui traverse toute son œuvre cinématographique : le dérèglement.
À travers cette parabole de la société contemporaine, elle dépeint les maux qui rongent son époque : le manque d’idéaux d’une jeunesse qui ne trouve plus de causes auxquelles se raccrocher, l’emprise d’une figure d’autorité sur un groupe d’individus, la défiance puis le rejet de la science.
Club Zéro, porté par la magnifique interprétation de Mia Wasilowska, est cruel, d’une implacable froideur mais est aussi traversé par de courtes scènes pleines d’humour. Il n’en est pas moins d’une nécessaire actualité. Mais attention, comme l’indique l’avertissement, au début du film, il n’est vraiment pas conseillé à ceux qui connaissent des problèmes avec la nourriture.

Sources : Arte.fr, Le Monde 22 mai 2023, Senscritique.fr, lebleudumiroir.fr, telerama.fr