The Fabelmans est un projet auquel Steven Spielberg songeait depuis longtemps : « Je me cachais de cette histoire depuis que j’ai 17 ans. Tout le monde me voit comme une incroyable success story, mais personne ne sait rien jusqu’à ce qu’on ait soi-même assez de courage pour dire : “Voilà qui je suis.” » 1 . À 76 ans, l’incontournable réalisateur américain, qui s’est adjoint la complicité de son scénariste et complice Tony Kushner, se propose enfin de lever le voile sur ses souvenirs d’enfance.
Mais son 35 ème long métrage n’est pas seulement une évocation intime et tendre de son histoire familiale ou de sa judéité. Cette chronique douce-amère qui revient sur son enfance ballottée de l’Ohio à la Californie permet au cinéaste de faire revivre ses proches, ses parents en tête. Il le fait avec beaucoup d’humilité et de maîtrise, avec à la fois le recul du vieil homme et l’amour inconditionnel de l’enfant. Le film donne aussi de nombreuses clés à l’univers spielbergien dont les héros se retrouvent systématiquement aux prises avec le monde des adultes, désenchanté et instable.
Mais The Fabelmans se présente aussi et surtout comme un film matriciel, l’occasion pour Spielberg de revenir à la naissance de sa vocation de cinéaste. Synthèse à la fois sincère et érudite de l’obsession du réalisateur pour le cinéma, le film interroge plus que jamais le pouvoir mystérieux des images, leur capacité à transcender le réel. Il vante ainsi leur dimension récréative, leur portée thérapeutique, leur capacité à percer des vérités inavouables et leur facilité à (ré)activer la communication entre les êtres. The Fabelmans apparaît comme la synthèse d’un cinéaste longtemps hanté par le pouvoir de l’image et, par extension, de la manipulation de celle-ci. Le cinéaste chevronné nous livre d’ailleurs à cette occasion une vision particulièrement brillante et éclairée de sa responsabilité en tant que metteur en scène.
Film lumineux, humble et abouti, The Fabelmans réenchante la toile grâce à la justesse et la virtuosité de sa narration.

Sources : La Croix 22/02/23, www.avoir-alire.com, www.critikat.com, Libération 21/02/23

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