Jeune veuve, Ratna a quitté sa campagne pour travailler à Mumbai et aider les siens. Domestique dans une riche famille de la ville, elle se plie consciencieusement à ses obligations sans pour autant perdre de vue son rêve de trouver un emploi dans la couture. Ashwin est un jeune homme mélancolique qui, malgré sa vie confortable, peine à trouver sa place depuis son retour de New York. Pour Ratna, Ashwin est Monsieur, son maitre, un titre qui, dans la société indienne traditionnelle, crée un fossé infranchissable entre eux.
Pour son premier long métrage de fiction, Rohena Gera met en scène un amour impossible dans l’inde contemporaine. Ashwin est jeune et a vécu à l’étranger mais il respecte pourtant la tradition qui l’étouffe. Selon la cinéaste, en Inde « même les individus en apparence les plus évolués et progressistes ont intégré une hiérarchie très clairement définie, car les normes sociales sont tellement enracinées qu’il est presque impossible de les combattre. » Monsieur restitue avec justesse ces carcans sociaux toujours actuels où la condition féminine est l’une des pires au monde.
Pourtant, Ratna ne se présente pas en victime; combative et positive, elle lutte pour changer de vie. Si dans le luxueux appartement d’Aswin, elle est prisonnière des non-dits et des entraves dues à sa condition, elle ne se laisse pas cloisonner et montre, dans ses déplacements même, sa soif de liberté. Ashwin semble, au contraire, plus enfermé; la ville, par exemple, ne représente pas pour lui une même ouverture.
Mais c’est dans une même aspiration au changement que les deux personnages se rejoignent au-delà de leur condition sociale. Pour Rohena Gera, « l’amour est la plus puissante incitation à repenser notre vision du monde ».
Fermement ancré dans une réalité sociale et politique que la réalisatrice espère faire évoluer, Monsieur met en scène une histoire d’amour délicate et jamais mièvre Avec douceur, subtilité et espoir, le film invite à reconstruire les relations au sein de la société indienne – et bien au-delà dans la compréhension et le respect mutuel.

Sources : dossier de presse, Télérama 26 décembre, Le Monde 17 mai 2018